C'est sûr, il est déchaîné, le mec Django. Remarquez, y'a de quoi parce qu'il en a vraiment chié avant d'en arriver là. Et puis... quand on joue pour Tarantino, se déchaîner,
c'est le minimum, le père Quentin ayant, on le sait, une prédilection pour la violence gratuite. Mais en fait, Django s'il se déchaîne, c'est pour notre plus grand plaisir. Imaginez... il a
réussi à rassembler dans une grande et belle maison du sud raciste des États Unis d'Amérique, tout ce que l'on peut compter de salopards, de fascistes, de nazis, de tortionnaires, de délateurs,
de collabos... Et là, avec leur aide bien involontaire, il repeint la bicoque aux couleurs de la révolution avant d'y foutre le feu. Et vous, sur votre siège, vous bichez sans la moindre fausse
pudeur.
Reconnaissez-le maintenant, ce n'est pas un fauteuil au spectacle que vous avez payé, c'est un tueur à gages. Et franchement, pour le boulot qu'il abat (en même temps que ses victimes) il ne vous a pas pris cher, le Django. Après quelques heures de souffrances, voilà qu'il vous débarrasse en quelques minutes de tout ce que vous détestez en cette société : l'intolérance, la bêtise, les exploiteurs, les esclavagistes, les vicelards, les dégueulasses, tous ceux qui souillent ce monde par leurs actes et leurs théories puantes. Tout ce que vous avez toujours rêvé de faire mais ne ferez évidemment jamais, Tarantino et son Django le font pour vous. Alors pourquoi se priver puisqu'au fond il vous évite d'avoir recours à la violence, se salit les mains à votre place.
Qu'un film aussi politiquement incorrect ait reçu les plus importantes distinctions peut étonner. Sauf si l'on se dit que c'était sans doute, pour le système, le seul moyen de récupérer un peu de l'immense talent qu'il véhicule : virtuosité de la mise en scène, somptuosité du décor, adéquation parfaite de la musique, jeu irréprochable des acteurs (Christoph Waltz magnifique en chasseur de primes). Et bien sûr, tout cela baigne dans un humour aussi noir que déstabilisant avec par exemple une scène appelée à devenir culte : les pionniers du Ku Klux Klan qui inaugurent des cagoules toutes neuves mais dont les femmes (les salopes !) n'ont pas fait les trous aux bons endroits. Du coup, l'expédition punitive tourne court... Tout cela se visionne évidemment au second degré : on rit, on pleure, on frémit, on prend des coups, on en donne, on a mal, on jouit... C'est la vie, c'est du vrai bon cinoche comme on l'aime, ça, coco !